dimanche 20 décembre 2009

Le retour de GI Jane

121 femmes sont mortes en Irak, dont 66 en combattant. C'est le petit rappel à l'ordre que nous livre Karen Lajon, la consoeure du JDD qui a pérégriné au Colorado, en Indiana et au Texas pour dégoter quelques unes de ces perles. Comme Rebecca Nava, qui oeuvra au sein de la Lioness Team, créé en 2003 pour accompagner les patrouilles et les search teams. L'idéologie dominante considérant jusqu'alors, c'est connu, que la présence d'une femme change tout, génère des tentations, et quand elle est blessée, rameute tout le monde sur elle (1) . Des lieux communs que l'armée américaine après l'épisode Jessica Lynch, a appris à gérer avec la réintroduction d'un test d'entraînement physique au combat, précise la conseure.
Le début d'une évolution de fond, alors que quatre femmes partent avec les forces spéciales des marines, constituant les 30.000 renforts de Barack Obama. Sur les 2 millions des combattants américains qui ont servi en Irak et en Afghanistan, 10% furent des femmes. Un taux, évidemment inapplicable aux latins que nous sommes.

Le + du Mamouth :

Il est évident qu'il est difficile de comparer : nous n'envoyons pas 30.000 soldats en renforts (l'équivalent d'un tiers de notre armée de Terre, et on s'étonne de ne pas avoir voix au chapitre...), donc encore moins quatre femmes issues des forces spéciales. Cependant, lentement, le glissement s'est opéré. La TF Chimère, constituée de paras avait déjà deux femmes, qui étaient allées en première ligne, comme les autres, pour des opérations de fouille, notamment. La TF Tigre en avait quelques unes aussi, notmament une servant un mortier, dont la vocation n'est pas forcément que de rester dans la FOB. La TF Black Roc poursuit cet évolution, avec au moins trois femmes dans ses équipes médicales, elles aussi placées en premières ligne (2).
A plusieurs reprises, des femmes ont aussi occupé les cockpits de Mirage F1CR, des Mirage 2000D, et de Caracal, au-dessus de l'Afghanistan. Même si cela fait régulièrement sourire certains, je rappelle que le stress est parfois plus en l'air que dans certaines zones du sol, et qu'un aéronef aura plus de possibilités d'être abattu dans une zone sans soutien, qu'un matériel roulant.
En RCA, en mars 2007, c'est même une patrouille de Mirage F1CT conduite par une femme qui a délogé les agresseurs d'un poste français, comprenant, si mes souvenirs sont bons, une infirmière féminine.

Même la marine, souvent pointée du doigt, a aussi féminisé sa vision. Plusieurs femmes ont été insérées dans les équipes de protection embarquées (EPE) opérant sur les navires de commerce, l'an dernier. Et un lieutenant de vaisseau féminin vient de recevoir la croix de la valeur militaire pour son engagement sur la libération du Ponant.
Evidemment, il sera toujours très difficile de féminiser des OMLT, qui vivent dans des conditions particulièrement précaires, et qui connaissent, aujourd'hui, le risque maximal, sur le théâtre. Mais ces pionnières françaises ont démontré que les femmes avaient bien leurs atouts à apporter aux opérations.

(1) j'ai alors beaucoup de mal à comprendre pourquoi les mêmes, chez nous, acceptent curieusement beaucoup plus de journalistes féminines dans leurs rangs pour les embeds...
(2) Dans un conflit comme celui de l'Afghanistan, mais aussi de Côte d'Ivoire, du Tchad, la notion de premierère ligne est de toute façon sujette à caution, "l'arrière" pouvant vite devenir l'avant. C'est aussi évidemment le cas pour les logisticiens qu'on oublie souvent, et pour qui l'avant est... à l'avant du convoi.
Notre photo : Elisabeth Jacobson (21 ans) fut la première aviatrice tuée en Irak, le 28 septembre 2005, lors de l'attaque de son convoi par un IED. (photo USAF). Ses amis ont créé un blog à sa mémoire (http://www.airmanjacobson.com/), là aussi le genre de choses que nous ne savons pas faire, en Europe.